A l'aube des choix, cultiver sa confiance



En janvier dernier, j'ai pris la décision difficile d'arrêter mon master recherche. Cette décision peu évidente était une première dans mon parcours. Pour la première fois, je décidais d'arrêter l'activité principale qui me définissait, je décidais de sortir des clous, je me dissociais de la pression que je m'infligeais pour correspondre à l'image d'un parcours réussi idéal. Je pense que la décision d'arrêter son activité principale, quelqu'elle soit, est toujours un défi vis à vis de nous-même. Car une situation connue et claire est souvent sécurisante même quand elle nous convient mal . Les semaines et mois qui ont suivi ce choix ont été riches en émotions contradictoires car je faisais face à beaucoup de doutes et à une difficulté plombante : avoir confiance en mes choix et en mon intuition. 

Aujourd'hui, plusieurs mois après, je voulais partager avec vous mon ressenti, les difficultés que j'ai pu traverser et surtout une partie des enseignements que j'ai retiré et retire encore de ce tournant dans mon chemin de vie. 


Je voudrais notamment vous parler du dedans, et pas uniquement de "l'après" souvent éclairci par le recul. Parce que ce que l'on vit au quotidien, c'est le dedans. Alors le partager, s'autoriser à en parler, à parler des doutes et des moments de lumière que l'on peut vivre au jour le jour, c'est comme se serrer les coudes, c'est comme se dire que l'on a le droit de traverser des turbulences. Même si le choix a été le nôtre et même si ce que l'on veut au fond, c'est l'assumer pleinement. J'espère que ce partage modeste pourra vous être utile, surtout dans les premiers temps lorsque la décision est toute fraîche et que nos peurs peuvent se faire si intenses. 


P R E N D R E   L A   D E C I S I O N   :   Ê T R E   H O N N Ê T E   A V E C   S O I - M Ê M E

Après deux licences entrecoupées d'une année à enseigner le français en Angleterre et alors que je m'étais lancée dans un master recherche, j'ai peu à peu ressenti ce besoin de savoir où j'allais. J'avais besoin d'attraper de la perspective pour donner du sens. Apprivoiser réellement mes aspirations professionnelles pour redonner du sens à mes études, ne plus simplement être diplômée pour être diplômée, ne plus seulement faire ce master parce que c'est la logique, parce que je m'étais convaincue, notamment sous la pression universitaire, qu'il fallait bien un master pour faire partie des "parcours accomplis". 

Mais faire pour faire, sans savoir pourquoi, pour quelles raisons intimes, ça ne s'est soudainement plus révélé suffisant. Sensation de dériver comme une barque au milieu de l'océan. Impression de perdre mon temps. Frustration. Mécontentement et déception vis à vis de moi-même, de mes rendus qui trahissaient mon manque d'intérêt et mon attitude bien grise.  

Cependant, beaucoup m'ont dit que tout le monde traversait des périodes de doute et de difficulté mais que ce n'est pas pour autant qu'ils arrêtaient tout. J'étais perdue. Alors je me suis faite face, et ai mis à plat honnêtement ce que je ressentais. J'ai du admettre cette confusion, ce brouillard et reconnaître que je ne me sentais pas à ma place dans ce master, que je ne me sentais pas épanouie. Je me suis également encouragée à faire face à cette autre réalité toute simple : la terre ne s'arrêterait pas de tourner si je cessais mon master. Enfin, je ne voulais plus que la peur du jugement m'empêche de faire ce qui faisait sens pour moi. J'ai donc choisi d'effectuer ce pas de côté, qui représentait pour moi une nouvelle version du "reculer pour mieux sauter". 


L E S   D E F I S   L I E S   A U X   C H O I X   I M P O R T A N T S

Prendre la décision a été difficile mais je crois qu'assumer cette dernière est ce qui s'est finalement révélé le plus ardu. L'assumer vis à vis de moi-même et vis-à-vis des autres aussi. 

Quelques semaines après avoir pris ma décision , le matin en me levant, j'avais régulièrement le cœur lourd du choix. J'avais - et ai toujours parfois - cette peur, cet instinct étranger que l'on m'avait comme infusé à l'intérieur, cet instinct qui me disait que je m'étais trompée. A travers les discussions et les échanges avec les autres, proches et moins proches, je suis comme devenue le réceptacle de certaines de leurs peurs. On me tenait des discours, pour mon bien évidemment - et je suis effectivement persuadée de cette motivation profonde - et j'étais comme inondée d'informations et d'avis. Toute cette agitation s'ajoutait à mes propres moments de doute. La note que je tenais finissait par changer de ton à leur écoute. Elle oscillait et je me désaccordais. 

Est-ce qu'on peut avoir le droit de choisir sans être sûr, sur une intuition et sur une simple croyance ? Celle que l'on fait le bon choix. Je voulais qu'on me laisse le temps de l'assumer et de faire corps avec. Je voulais qu'on me laisse respirer. 

Et, finalement, j'ai compris petit à petit que cette logique n'était pas la bonne. C'était à moi de me laisser respirer, en me donnant un espace plus grand que celui que je laisse aux avis des autres dans mon esprit. En me faisant confiance.




C U L T I V E R   L E   P O S I T I F   

Se faire confiance, c'est une vaste notion, c'est une grande tâche. C'est surtout un apprentissage du quotidien. Un petit à petit, un pas après pas. 

Ici, quand le cœur est lourd et que j'ai l'esprit rempli de l'angoisse qu' a pu provoquer une discussion qui m'a poussée à me remettre en question un peu violemment, ou un coup de stress venu de l'intérieur, j'essaie d'abord de laisser passer l'émotion perturbatrice, de la ressentir physiquement plutôt que d'écouter les discours négatifs qu'elle peut me tenir. Puis je la laisse couler de ma tête jusqu'à mes pieds, pour qu'elle s'en aille. Ca permet de faire le vide et de prendre du recul par rapport à ce qui a pu s'échanger et par rapport à mes doutes agités. Ce n'est pas encore tout à fait un réflexe immédiat, mais j'y viens de plus en plus et je ne peux que reconnaître les bien faits de cette pratique tirée de mes lectures sur la méditation. 

Se rasséréner passe également par me dire que j'ai confiance. Au lieu de me dire "j'ai arrêté, je ne sais pas où je vais, peut-être que je n'aurais pas dû, peut-être que je vais le regretter", ce qui n'est qu'une fantaisie de mon esprit puisque personne ne connait le futur ; je prends la même situation mais relève le positif "j'ai arrêtée car je me suis écoutée, j'ai eu le courage de prendre une décision venant du cœur, je vais explorer de nouvelles choses en m'ouvrant à une nouvelle expérience". Ce n'est pas une baguette magique ou encore une autre liste d'astuces au format de manuel. C'est simplement un début. A chacun de voir le positif que contient sa décision, il y en a beaucoup plus que ce que l'on pense. Courage. C'est également apprendre à être optimiste, oui, apprendre à y croire. Apprendre à croire en soi. 


S A V O I R   S ' O U V R I R   A   L ' A U T R E   S E R E I N E M E N T

Il s'agit peut-être aussi  de ne pas redouter l'autre, de ne pas diaboliser sa parole, ne pas songer immédiatement que parce qu'il est en désaccord, ou émet un point de vue divergent, ses mots sont contre nous. Savoir être à l'écoute, savoir entendre les conseils et les avis sans en trembler à chaque fois. S'enrichir de l'expérience et de la vision de l'autre sans tout chambouler d'un coup d'un seul, sans se persuader que l'autre sait mieux, qu'on aurait dû faire comme ça, qu'il a forcément raison et que l'on a forcément tort. Voir comment ce qui a été entendu peut enrichir notre propre réflexion et finalement consolider autrement notre choix. "Tu émets tel et tel avis, j'entends, je vais dans ton sens pour certaines choses mais sur ça je ne suis pas d'accord avec toi pour telle et telle raison".

Ne pas oublier que partager avec l'autre, dire ce que l'on pense, c'est comme autant d'occasions d'affirmer son choix, de l'affirmer aussi auprès de soi et de cette petite voix qui veut toujours gâcher la fête. 


L E   C H O I X   :   V E R S   L ' E X P E R I E N C E   P L U T Ô T   Q U E   V E R S   L E   R E S U L T A T

Enfin, je crois qu'il s'agit de désacraliser le choix en le libérant du poids du résultat, ne pas lui faire tomber dessus toute la pression des adjectifs bon ou mauvais. A nous de voir que chaque choix est une porte ouverte vers une expérience, à nous de saisir, petit à petit, tout le potentiel enrichissant de cette dernière, de le cultiver. De lui laisser la chance de nous apprendre quelque chose, sur le monde, les autres et sur nous-même. Je crois que c'est une des meilleures façons, pour moi, de ne pas avoir peur de l'avenir et de cultiver ma confiance. Après tout, l'aube, ce n'est que le début de la course du soleil. 



Et vous, comment cultiver-vous votre confiance en vos choix et en la vie ? 
Est-ce que cela vous parle : oser faire une pause pour regagner en perspective ?

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