Traverser les courants froids



C'est cette espèce de culpabilité d'aller mal, d'avoir le dos dans le creux de la vague. Souvent, c'est difficile à expliquer, à décrire. On cherche les mots, on renverse notre tête dans un sens puis dans un autre pour que les bons adjectifs sortent sans avoir honte mais c'est compliqué.

Quand on a une nature sensible, on est plus souvent soumis à différents courants. Cela revient à se baigner dans une grande rivière, au fur et à mesure de notre immersion on tombe sur un courant chaud et soudain, quelques pas de côté, un petit mètre de franchi et nous voilà sans bien comprendre pourquoi dans un courant froid. J'ai eu cette sensation ces dernières semaines, celle d'être ballottée, de subir un courant froid, surgi sans crier gare. Le réflex premier c'est de lutter, c'est de vouloir ramer à contre courant, parce qu'on ne veut pas y aller, on ne veut pas être emmené par là-bas, au loin, derrière les vagues et sous les nuages. On rame, on rame, on rame si fort. Mais je sais maintenant que lutter contre ce que l'on ressent ne fait que se cristalliser le problème et les symptômes. L'angoisse perdure, elle se renforce de toute l'énergie déployée à vouloir lutter contre soi-même. Et elle gratte fort, elle sert fort la malheureuse.


Et on angoisse de cette angoisse, de ce mal-être, parce qu'enfin, de nos jours, dans cette société moderne... c'est devenu si moche d'aller mal. J'ai cette impression quand je regarde le monde proche, les gens, que je fonctionne mal. Que je ne sais pas m'y prendre. Comme si c'était anormal de se sentir parfois complètement au creux de la vague, le moral si bas sous mes pieds. Alors je ne veux pas étaler tout cela ici trop en détail, je ne veux pas donner le rôle premier à mon angoisse ou à ce qui me tracasse car ce serait lui faire trop plaisir, mais je veux accueillir, je veux dire que c'est normal, que ça existe. Qu'il n'y a pas à avoir honte et que c'est en se détendant que le ciel retrouve sa légèreté.


L E   D R O I T   A   R E S S E N T I R

Se détendre... Lâcher prise... accepter de se sentir aussi mal, ne pas avoir honte et se dire que sur cette rivière en mouvement perpétuel, si on fait la planche, les membres détendus et les yeux vers le ciel, on flotte. Aller avec le courant. La clé : la confiance. Mais c'est dur, c'est difficile d'avoir confiance en soi et en la vie, y croire. Alors je réclame le droit à mettre à bas ce taboo. Non, on ne va pas toujours bien, non on ne "enjoy" pas toujours la vie. Tout ça, ce ne sont que les slogans publicitaires d'une société qui a tellement peur d'aller mal qu'elle en vient à mettre une pression de dingue et qui ne dit pas son nom sur ses membres. Ces discours n'aident pas, tout le travail maintenant c'est de les déraciner, de se faire confiance, de faire confiance à la vie pour nous emmener là où l'on doit être. Car tout est déjà là, nous sommes là où nous sommes, il n'y a aucun mal à ça. Et on fait de notre mieux. 

N'ayons pas peur d'embrasser tout ce que nous sommes : des êtres vivants et non des machines qui, par conséquent, ne sont pas toujours brancher sur la même émotion de joie. Soyons vivants, avec tout ce que cela implique.  Pour ma part, je lutte un peu en ce moment avec ma volonté de dessiner les grandes lignes de ma vie suite à mon choix de prendre du recul sur mon orientation. Et parfois, alors même qu'on sait que notre vue n'est jamais objective et même un peu rude, on se dit qu'on n'avance pas, que l'on n'est pas la personne que l'on voudrait être, qu'on laisse filer le temps sans saisir notre chance de modeler notre vie.... Mais je souhaite laisser ces peurs s'échapper et pour cela, j'ai besoin de ne pas être toujours en train de me persécuter. De me reprocher de ne pas avoir le moral ou de ne pas parvenir à être aussi active que ces fameux "autres". J'ai besoin de me rappeler que je suis humaine.

Je voulais simplement écrire que cela existe, que oui, nous sommes humains. Nous souhaiter beaucoup de détente et de douceur envers nous-même. Surtout lorsque nous traversons des courants froids. Et, très humblement, nous inviter à continuer de cultiver les étincelles pour préserver et nourrir notre feu intérieur. Je me remets de ce pas à venir les accrocher ici, pour doucement baigner à nouveau dans un courant chaud. 

Est-ce que cette métaphore des courants chauds et froids vous parle ? 
Quel est votre avis sur cette question ?

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